Efficacité des gants

1Si on fait des recherches approfondies sur les études scientifiques qui traitent des conséquences des accidents de moto sur les mains, force est de constater que le fonds documentaire est plus que pauvre car nous n’avons trouvé aucune étude qui traite, même globalement, de ce sujet.

Certes nos scientifiques se sont avant toute chose focalisés sur le port du casque et les moyens d’en améliorer l’efficacité puisque, en cas de chute, c’est la tête qui est la plus exposée et les conséquences du moindre choc peuvent être dramatiques, voire fatales.

Mais pour nous petites menotes, rien, ou quasiment rien sur le sujet !

Bon, en faisant presque les poubelles des fonds documentaires scientifiques, nous sommes tout de même parvenus à trouver quelques éléments d’information que nous vous livrons ici en exclusivité car, à notre connaissance, nous sommes les premiers à rédiger une synthèse in french sur ce sujet.

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Eléments d’études scientifiques

Lors d’un accident, une étude montre que si 98% des motards portaient leur casque, seulement 80% portaient des gants. Ces valeurs sont très proches de ce qu’on peut constater sur nos routes européennes, surtout en été !

Une étude menée en Australie en 2006 sur l’utilisation de protections par les 2RM (2 Roues Motorisés) montre qu’ils sont 94% à porter des gants en conduite normale (trajet travail et balade), mais ce chiffre chute à seulement 46% lorsqu’il s’agit de petits trajets utilitaires (faire une course par exemple).

Cette même étude montre que si les motards en général, et ce quelque soit le type de moto, portent les gants à environ 90%, les usagers de scooters ne sont plus que 72% à porter des gants.

Pour ce qui est des conséquences traumatologiques sur les mains, il est dit que les mains font très souvent l’objet d’abrasion et de lacération provoquant rarement des blessures graves. Cependant, les nerfs étant directement attaqués, les conséquences peuvent être très invalidantes par la perte de la motricité, du contrôle et de la sensibilité de tout ou partie des zones atteintes et des muscles situés en aval.

Pourquoi si peu d’éléments statistiques ? Tout simplement parce que ces blessures, comparées aux autres, ne sont pas considérées comme graves par les traumatologues spécialisés dans les accidents de la route. Il nous faut donc faire avec ce peu d’informations.

Quels risques pour nos menotes ?

Pour comprendre les conséquences directes d’une abrasion ou lacération de la main (paume, doigts, dessus), il faut savoir comment tout cela fonctionne, donc voici quelques rudiments sur la physiologie de cet outil magnifique qui, au service d’un cerveau surdoué, a permis à l’homme d’évoluer.

Blessures profondes

Le non port de gants ou le port de gants mal adaptés ou n’apportant pas la protection suffisante en cas de chute peut provoquer des blessures plus ou moins profondes avec des atteintes telles que décrites plus loin.

Les photos ci-dessus montrent une blessure profonde juste après l’accident puis son état trois mois après. Ca donne à réfléchir …

Flexion et extension des doigts

Au niveau de chaque doigt circulent deux tendons fléchisseurs (superficiel et profond) qui assurent la flexion des phalanges du doigt et qui passent dans des sortes de poulies. Le pouce est un cas particulier car il n’a qu’un seul tendon fléchisseur.

Tous les tendons fléchisseurs sont maintenus sur toute leur longueur au contact des structures osseuses par des renforcement de la gaine digitale appelés poulies. Les poulies A2 et A4 ont une importance fonctionnelle considérable et doivent toujours être reconstruites.

Chaque doigt, sauf le pouce, reçoit un tendon extenseur issu du muscle extenseur des doigts. L’index et l’annulaire ont chacun leur propre extenseur qui vient renforcer l’action de l’extenseur commun des doigts.

Risque: limitation voire perte du mouvement des phalanges.

Sensibilité

Sur la face palmaire de la main, le territoire sensitif du nerf médian comprend la partie latérale de la main, les 3 premiers doigts et la moitié radiale du 4ème. L’autre moitié cubitale du 4ème doigt ainsi que le 5ème doigt sont innervés par le nerf ulnaire. Sur la face dorsale, le médian innerve les territoires cutanés des 2ème et 3ème phalanges du 2ème et 3ème doigt et la moitié radiale du 4ème doigt.

Risque: perte de toute sensibilité ce qui expose à des accidents fréquents et qui peuvent rapidement dégénérer (brûlures de froid ou de chaud non ressenties = traumatismes profonds qui peuvent mener à l’amputation).

Circulation sanguine

Les artères interdigitales suivent les nerfs et se subdivisent en artères collatérales. Lors d’une lésion d’un nerf collatéral, les artères interdigitales sont pratiquement toujours touchées.

Risque: hémorragies locales internes très douloureuses.

Protection exigée d’un gant

On sait maintenant qu’un gant doit protéger contre l’abrasion et la lacération, ce qui veut dire en diminuer les effets afin de limiter les traumatismes.

Par exemple, vous jouez du piano ou de la guitare, vous travaillez sur ordinateur, votre métier impose l’usage intensif de la main et de ses doigts: vous comprendrez immédiatement les conséquences pour votre vie quotidienne de ne pas porter de gants efficaces en cas d’accident.

La circulation sans gant est donc à proscrire quelle que soit la situation ! C’est une protection aussi indispensable que le casque car, en cas de chute, c’est un réflexe les mains touchent le sol en premier: même une simple chute à 20 km/h peut provoquer des blessures nécessitant plusieurs mois de douloureux traitements avec des séquelles définitives.

Un gant doit apporter une protection de la tête cubitale du poignet, la base de la paume, la tranche de la main côté auriculaire et les articulations. Mais les contraintes de coût, de fabrication (un gant est très compliqué à assembler) et d’utilisation imposent un compromis qui doit reposer sur plusieurs objectifs:

– une bonne préhension et un bon senti des commandes = il doit être souple et peu épais

– être adapté à la saison = plutôt aéré l’été (certains fabricants traduisent par “mince”)

– protéger du froid l’hiver = épaisseur sur le dessus

– protéger des chutes (abrasion et lacération) = épaisseur côté paume

– protéger les articulations = coques rigides au niveau des articulations

– être confortable = facile à enfiler, agréable à l’usage prolongé

– être bien fini = pas de couture intérieure qui gêne

Après cette liste de contraintes contradictoires entre elles, on comprend mieux pourquoi il est si difficile de trouver “gant à sa main”, avec un rapport prix/qualité honorable.

Comment choisir ses gants

Il fallait quand même terminer cet article par une série de conseils sur la manière de sélectionner la paire de gants qui vous apportera satisfaction et protection. Nous ne ferons pas le plagia de tous les conseils que l’on retrouve sur presque tous les sites motards, mais nous préférons attirer votre attention sur trois points essentiels et sur lesquels il ne faut jamais transiger.

Confort: les gants doivent avoir la bonne taille et, si vous prenez des gants en cuir de qualité, prenez-les juste à votre taille car à l’usage le cuir se détend. Ne prenez pas de gants avec. des doigts trop longs ou courts par rapport à la morphologie de votre main.

Fabrication: Vérifiez qu’ils sont fabriqués avec des matériaux offrant une bonne résistance à l’abrasion et la lacération (cuir obligatoire sur la face interne des doigts et de la main) et que les coutures sont solides (tirez dessus et vous verrez …).

Subjectivité: On choisit trop souvent ses gants (mais pas seulement les gants) sur des critères avant tout esthétiques mais aussi de prix. Sachez qu’en la matière, c’est souvent les plus moches et les plus chers qui vous apporteront la meilleure protection. Alors, entre votre image et votre protection, il faudra choisir !

Maintenant, de même que vous mettez votre casque de qualité avant le moindre déplacement, enfilez vos gants de qualité, quitte à prendre un modèle aéré pour les fortes chaleurs.

Bibliographie

Motorcycle Accident Cause Factors and Identification of Countermeasures (AKA the “Hurt Report”). US National Technical Information Service (January 1981).

CHU de la Pitié Salpêtrière – Unité d’orthopédie

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